Quand des diplômés.es d’Afrique intègrent la profession infirmière au Québec
Lundi le 28 octobre 2024, 06:54:05Source – Par Alain Lallier, Portail du réseau collégial
Répondre aux besoins importants de main-d’œuvre
Le Cégep de Valleyfield en est déjà à sa troisième cohorte de personnes qui, après avoir obtenu un diplôme en Afrique, ont besoin d’une formation additionnelle pour bien s’intégrer au système de santé québécois. D’ailleurs, ce programme a suscité un intérêt tout particulier dans la région afin de répondre aux besoins importants de main-d’œuvre en soins infirmiers. Comme l’Hôpital Vaudreuil-Soulanges, actuellement en construction, ouvrira ses portes à la fin de 2026, le CISSS de la Montérégie-Ouest est déjà en mode recrutement. Et tous les établissements du CISSS y contribuent en offrant des places pour les nouveaux et nouvelles stagiaires.
Le Cégep s’est porté volontaire pour accueillir des cohortes de 20 personnes. La première cohorte en comptait 19; la deuxième, deux mois plus tard, 17; la troisième, en juin 2024, 20. Une quatrième cohorte est prévue en mars 2025.
Une collaboration de toute la communauté
Ce programme est une initiative de trois ministères québécois, à savoir Immigration, Santé et Services sociaux et Enseignement supérieur. Les entrevues et le recrutement des candidates et candidats ont été réalisés par les ministères de l’Immigration et de la Santé. De son côté, le Cégep s’est chargé des demandes d’admission et de l’accueil. « À la formation continue, c’était la première fois que nous accueillions des étudiantes et étudiants étrangers », explique madame Barrette. « Nous avons appris à la vitesse grand V. Nous avons bien travaillé avec le registrariat et avec tous les services du Cégep. C’est vraiment toute la communauté interne et régionale qui a été mise à contribution. Les organismes communautaires du milieu, comme le CRESO Centre-conseil en emploi, Réseaux et Alliance carrière travail (ACT) ont également offert un soutien important. Toute la région a contribué, que ce soit pour trouver des logements, inscrire les enfants à l’école ou régler les démarches administratives. Chaque semaine, on faisait le point pour savoir où on en était. Nous avons ouvert une friperie. Les gens ont été très généreux. Ils ont apporté beaucoup de vêtements. Il faut bien comprendre que ces personnes sont arrivées en février et que, pour la plupart, elles venaient du Cameroun. En arrivant à nos bureaux, un des premiers candidats nous a expliqué qu’il faisait 33 degrés chez lui hier et qu’il fait -33 ici aujourd’hui; bref, il ne voulait plus sortir dehors ! »
Pourquoi venir au Québec?
Qu’est-ce qui motive ces personnes à vouloir venir travailler et étudier au Québec alors qu’elles sont déjà diplômées dans leur pays ? Les étudiantes et étudiants disent souvent aspirer à une vie meilleure pour eux-mêmes et leurs enfants. « Des personnes sont arrivées avec deux, trois et même quatre enfants. Et quelques-unes ont même connu des échecs, ce qu’elles n’avaient pas envisagé du tout. Nos standards devant demeurer les mêmes pour tout le monde, nous avons dû raffiner nos critères dans le choix des candidates et des candidats, et ce, en mettant l’accent sur des questions plus techniques dans les différents champs de la pratique infirmière », explique Marie Barrette. Les conjoints et conjointes travaillent aussi dans des entreprises de la région, dans différents domaines.
Une lourde semaine de plus de 50 heures
Lorsqu’elles arrivent, ces personnes sont engagées comme préposés.es aux bénéficiaires dans un établissement de santé de la région. Avec leur permis d’étudier, elles peuvent travailler 20 heures par semaine. Cela leur permet de mieux boucler leur fin de mois. Le programme exige une trentaine d’heures d’études par semaine. Si on ajoute à cela les obligations familiales et l’adaptation à un nouveau milieu, ça finit par faire un très gros programme ! Sachez que les personnes inscrites dans ce programme reçoivent une allocation hebdomadaire. Par contre, elles ne sont pas couvertes par l’assurance maladie du Québec, mais leurs enfants le sont quand ils entrent dans le système scolaire.
Un programme d’intégration à la pratique québécoise
Le programme vise à faire le lien entre la profession telle qu’elle est pratiquée dans leur pays d’origine et les normes québécoises, entre autres au niveau de l’asepsie. D’une durée d’environ 900 heures, le programme comporte un tiers de théorie, un tiers de pratique et un tiers de stages. Voici quelques exemples de cours au programme : communiquer en soins infirmiers; principes de pharmacothérapie et dossier clinique; cours de réanimation; intervention infirmière en médecine et en chirurgie. Selon l’étude de leur dossier par l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), certaines personnes pourraient devoir suivre et réussir des cours complémentaires.
Ce programme d’AEC est offert en tout temps dans six cégeps. Toute personne qui arrive au Québec peut faire analyser son dossier par l’OIIQ et suivre cette formation d’intégration à la profession infirmière.
Répondre à des besoins imprévus
Madame Barrette ajoute : « Au service de formation continue, nous avons fait face à certaines situations où des étudiantes et étudiants nécessitaient un soutien plus important, notamment sur le plan financier, pour s’adapter à la réalité d’ici. Notre équipe, mais aussi l’ensemble du filet de sécurité tissé avec les partenaires, ont permis de bien les accompagner. »
Le fait que les personnes aient été recrutées en Afrique francophone facilite l’intégration, mais elles ne sont pas toujours à l’aise avec le parler québécois. Par exemple, quand une patiente âgée dit à une stagiaire qu’elle a « mal au cœur » et que cette dernière lui demande si elle a ses médicaments, la patiente répond qu’elle a « juste envie de vomir ».
Des collaborations entre services et entre cégeps
Le service de formation continue travaille en étroite collaboration avec le département de soins infirmiers, qui compte près de 50 enseignantes et enseignants. Par ailleurs, des collaborations se sont tissées entre les cégeps qui offrent ce programme d’AEC, entre autres pour l’échange de matériel pédagogique. D’autres rencontres au sein du réseau collégial ont aussi été le théâtre d’échanges sur les meilleures pratiques, notamment en matière d’accueil.
Des statistiques de réussite impressionnantes à l’examen de l’OIIQ
Sur les 14 finissantes et finissants qui se sont présentés à l’examen de l’OIIQ en mars 2024, 11 l’ont réussi à leur première tentative. C’est 79 % de réussite.
Au niveau de l’enseignement régulier en soins infirmiers, c’est 100 % de réussite au dernier examen.
À noter que 32 cégeps participent au programme d’intégration :
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- Abitibi-Témiscamingue
- André-Laurendeau
- Baie-Comeau
- Beauce-Appalaches
- Bois-de-Boulogne
- Centre d’études collégiales en Charlevoix
- Chicoutimi
- Drummondville
- Édouard-Montpetit
- Gaspésie et des Îles
- Granby
- Lanaudière
- Lévis
- Limoilou
- Lionel-Groulx
- Maisonneuve
- Matane
- Montmorency
- Outaouais
- Rimouski
- Rosemont
- Saint-Félicien/Chibougamau
- Saint-Hyacinthe
- Saint-Jean Richelieu
- Saint-Jérôme
- Saint-Laurent
- Sept-Îles
- Shawinigan
- Sorel-Tracy
- Thetford Mines
- Valleyfield
- Vieux-Montréal
- Environ 1350 étudiantes et étudiants sont inscrits pour l’ensemble des 5 phases.
- Taux de réussite aux examens de l’Ordre :
- 512 étudiantes et étudiants ont réussi la formation à ce jour pour les 3 premières phases (données partielles, car plusieurs cohortes encore en cours);
- Taux de réussite au dernier examen de l’OIIQ de 88 %. * Ce taux de réussite prend en considération les personnes étudiantes de la phase 1 et quelques-unes de la phase 2. Les résultats pour l’examen de septembre 2024 sont à venir.